La procession du dimanche des Rameaux est probablement la manifestation religieuse la plus importante pour les catholiques de Terre Sainte et elle réunit beaucoup de pèlerins venant du monde entier. En effet, c’est une occasion unique de marcher avec sa propre communauté sur le chemin parcouru par Jésus pour entrer triomphant à Jérusalem. En cette année particulière, peu de personnes pourront participer à la célébration : les religieux et les fidèles catholiques de Jérusalem et de Nazareth, peut-être même quelqu’un de Bethléem, la bande des scouts avec des tambours et des cornemuses mais aucun pèlerin. « Ce sera quand-même un moment pour jouer, chanter et crier au monde que nous sommes là et que nous avons fait nôtre le message d’amour révolutionnaire de Jésus », racontent les fidèles de Terre Sainte.
Le point de départ sera, comme toujours, la petite église franciscaine du village de Betfage, où les disciples ont trouvé un ânon et une ânesse sur lesquels personne n’était pas encore monté, parce qu’ils étaient destinés à être montés par le Christ, qui accomplirait ainsi une prophétie annoncée par Zacharie 500 ans plus tôt : « Dites à la fille de Sion : Voici, ton roi vient à toi, monté sur un âne, Sur un âne, le petit d'une ânesse » (Zac 9,9). Pendant la construction de la petite église en 1883, on a trouvé une grande pierre carrée décorée sur chaque côté avec des fresques d’un bleu, rouge, jaune, vert et violet, encore brillants aujourd’hui : sur le côté sud, la scène de Marthe, Marie et Lazare ressuscité, sur le nord, l’ânesse et le poulain venant détachés et sur le côté est, une foule en liesse agite des rameaux de palmiers réservées aux cortèges des personnages royaux. La grande pierre faisait partie de l’église croisée d’époque byzantine et d’ici, déjà au cours du XII siècle, partaient les premières processions du dimanche des Rameaux vers Jérusalem : vivre de nouveau l’épisode raconté dans l’Évangile est une tradition très ancienne.
Depuis la petite église, suffisamment large pour accueillir les autorités religieuses mais pas les pèlerins qui en général commencent la procession depuis le monastère carmélite du Pater Noster, on descend ensuite du Mont des Oliviers en longeant le complexe du Gethsémani. Gethsémani signifie littéralement « pressoir des oliviers » et, en effet, ici croitent huit oliviers centenaires plantés il y a 800 ans par les croisés, tous parfaitement saines et nés de la même racine, peut-être d’un arbre vénéré déjà à l’époque comme témoignage du passage e de la passion de Jésus. Une curiosité sur les palmiers et les rameaux d’oliviers agités pendant la procession : la tradition dérive de la fête hébraïque de Sukkot, la fête de la Cabane liée à l’arrivée du printemps pendant laquelle les fidèles montaient au temple en apportant un bouquet de palmiers, myrte et saule et, en effet, à Jérusalem, pendant la procession on agite de grands palmiers d’un beau vert brillant. En Italie, en revanche, c’est la tradition d’utiliser les rameaux d’oliviers bénis pendant la messe, portés à la maison et distribués à la famille comme symbole di paix et de bon augure.
En dessous du jardin des oliviers, en contraste avec les verts arbres, il y a une esplanade de pierre, composée des pierres tombales de l’immense cimetière juif. Ici le paysage coupe le souffle : on voit les murs de la vieille ville et la coupole dorée de la roche qui brille sous le soleil. Le dimanche des Rameaux, à Jérusalem, est en général une merveilleuse journée de printemps ensoleillée et cette année ne sera pas différente. Le parcours est court, seulement deux kilomètres et demi en descente, parcourus lentement et avec des arrêts fréquents pour des chants et des prières, parfois un peu compliqué à parcourir puisqu’il passe dans des quartiers musulmans chaotiques et un peu relâchés. Enfin on entre à Jérusalem en passant par la porte des Lions, structure en pierre décorée d’un groupe de panthères, le seul portail resté ouvert parmi ceux qui regardent à l’est. Cependant, Jésus n’est pas passé par ici, mais par le Golden Gate, une porte imposante qui donne directement sur la montagne du Temple et qui reste encore scellée.
Ici la procession se fera plus peuplée, encore plus bruyante et joyeuse, assez pour bouleverser positivement la journée ordinaire des habitants du quartier musulman où se trouve la dernière étape, l’église de Sainte Anne. Les palmiers seront agités et de nouveau la foule criera heureuse : « Hosanna ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! Béni soit le règne qui vient, le règne de David, notre père ! Hosanna dans les lieux très haut ! » (Mc 11, 9-10).